[ Un tissu qui s'agite, sa blancheur étincelante au soleil, et puis le train démarre, et le tissu n'est bientôt plus qu'un point, et enfin une image gravée dans la mémoire, il n'est plus que virtuel. Sa réalité ne subsiste que dans l'esprit.]

C'est un immense monstre qui nous ronge, la culpabilité. Au début, je ne voulais même pas écrire cet article, puisque que tu vas le lire, et qu'au fond, je ne sais pas si j'en ai envie...Mais j'ai besoin de l'écrire, et, surtout, j'ai besoin qu'il soit publié ailleurs que dans mon cahier d'histoires déprimantes.

Dans cette histoire, il y a un jeu de cartes du royaume des fées. Dont on veut savoir si, scientifiquement, il pourrait y avoir quelque chose de mystique. Comprenez, si, en calculant les probabilités pour l'un des tirages, l'une des réponses ne reviendrait pas plus souvent que l'autre. Auquel cas, toutes les réponses seraient faussées et donc inutiles.
Ensuite, il a une chanson d'amour qui passe en boucle depuis une heure ou deux au moment où commence l'histoire.
Il y a encore un portefeuille qui va sans doute ne plus vraiment l'être d'un coup.
Et au milieu de tout ça, il a un être féminin. On va l'appeler Culpabilité, parce que de toute façon, c'est le nom qui lui correspond le mieux pour le moment, et sans doute pour pas mal de moments à venir.
Il y a aussi un autre personnage, mais qui n'est pas présent sur la scène. Le narrateur ne sait pas quel nom lui donner pour le moment, nous l'appellerons l'Homme.
Jusqu'à peu, Culpabilité n'était pas ce qu'elle est maintenant, elle coulait des jours heureux, insouciants, oubliant une histoire précédente qui elle aussi était remplie de culpabilité...Sauf que depuis la veille du début de notre histoire, Culpabilité ne mérite plus l'Homme. Le passé revient au triple galop, et Culpabilité est perdue, Culpabilité n'arrive pas à savoir quoi faire.
L'Homme lui a dit qu'elle pouvait dormir sur ses deux oreilles, mais au début de notre scène, Culpabilité n'en croit pas un mot. Car justement, ce nom, qui lui correspond si bien, la ronge trop...
Qui n'a jamais rêvé de pouvoir mettre sa vie en arrière rapide pour recommencer ? Culpabilité l'a vraiment désiré de nombreuses fois, mais évidemment, aucune grâce divine n'est intervenue, puisque de toute façon, Culpabilité ne croit pas à une entité divine.
Dans notre scène, Culpabilité repense à ce qui lui a valu de porter ce nom-là dans le passé. Des choses dont elle a très peur, et qu'elle croyait avoir semées. On dirait bien que non... Culpabilité à commencé à porter son nom dès le plus jeune âge, dès la maternelle. Elle y est habituée d'un côté, il lui est familier, elle l'apprécie presque, il est douillet. L'Homme l'en avait extraite d'abord un peu, puis à peu près entièrement, à ce qui lui semblait...Elle était alors devenue Rayonnante.
Mais une idiotie de Rayonnante, qui, souvent, devenait aussi Jalouse, par rapport à une autre entité féminine, l'a faite retombée dans son nom précédent. Peu après, la Jalouse est aussi revenue un peu. Mais pas autant que Culpabilité.

Aujourd'hui, Culpabilité à besoin de Solitude, qu'elle fréquente d'habitude très régulièrement. Mais elle se refuse étrangement...
Culpabilité est aussi Perdue.
Culpabilité veut la rédemption, à n'importe quel prix. L'Homme peut tout exiger si bon lui semble...

[ Une Tempête dans un lampadaire, un orage qui éclate dans la petite cage de verre, petit enfant turbulent qui cherche à grandir...Et finalement, la lumière s'installe pour de bon. Le calme règne maintenant. ]

[ Une débauche de mouvements, de gestes, de mines, qui entraînent à leur suite un abrutissement undistinc, où contemplation et nostalgie se mêlent et s'entrelacent. ]

[ Les branches des arbres morts sont figées par la douleur et le froid, alors qu'à côté, certains arbres sont en train de renaître et de crier leur bonheur au monde, déployant leurs branches verdies et les bourgeons qui s'y accrochent, avec arrogance. ]

[ Avoir des ailes de papillon, pour s'envoler haut dans le ciel, aller de fleur en fleur, s'emplir de chacune, et repartir avec toujours un goût sucré dans la bouche ]

[ Quelqu'un qui ne laisse pas la réalité déranger ses rêves est un sage ]

Christiane Singer